une PEP chez les BPCO?

Questions techniques, théoriques, le biomédical...

Modérateur : Marc

Kmille
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une PEP chez les BPCO?

Message : # 77609Message non lu Kmille »

Bonjour à tous,
Je suis étudiante IADE en première année, et une notion n'est pas claire:
Pour l'anesthésie des patients BPCO, mettez vous une PEP?
En cours, j'ai compris qu'il fallait en mettre une pour diminuer le volume de fermeture (et donc favoriser l'expiration en ouvrant le bronches fermées par l'inflammation), et l'associée à de bons volumes courants et une fréquence respi basse (pour augmenter le temps expiratoire)
En stage, on m'a dit qu'il ne fallait surtout pas de PEP, et faire de petits volumes à haute fréquence (pour limiter les complications de l'emphysème: le barotraumatisme).

j'ai cherché un peu sur internet pour me faire mon propre avis, mais je suis un peu perdue.
http://www.sfar.org/acta/dossier/archiv ... a02_22.htm

Cette page est très intéressante mais je suis toujours aussi embrouillée. Ils parlent de PEP intrinsèque et extrinsèque...?
Si quelqu'un(e) peut m'éclairer...
Mister Hyde

Re: une PEP chez les BPCO?

Message : # 77610Message non lu Mister Hyde »

Je te dis ça sans fioriture:

il existe une composante spastique, restrictive (bronchospasme), dans la BPCO donc sous Ventilation assistée selon mes anciennes écoles on augmentait le temps expiratoire pour permettre une purge des alvéoles, à défaut on obtient une PEP "...

Pour la prévention des barotraumatismes (emphysème= risque PNO), on descend les alarmes et limites de pression et le mieux on ventile en mode de pression quand c'est possible.

Donc quasifatalement la FR est diminuée dans le premier cas dans le cycle/minute, et en mode de pression la fréquence peut être plus élevée et pour une même objectif de V°/min

attention les petits volumes rassurent parfois faussement au niveau de l'etco2 à cause d'un balayage espece mort, il suffit d'une inspiration plus conséquente en manuel pour s'apercevoir que les paramètres étaient faussés!

Deuxio on utilise de préférence un bronchodilateur,genre halogoné, qui permet en outre l'entretien de la narcose.

pour la composante obstructive, les sécrétions, on évite les Atropiniques, les parasympatolytiques donc car la viscosité est augmentée par le biais de la composante aqueuse modifiée ..

un peu de ventoline ne fait pas de mal...dans le circuit...ou la sonde sous réserve accord du MAR.

Et on préfère l' ALR quand c'est possible , même si elle s'oppose à l'expectoration en cas de bloc moteur paroi abdo....

Je pense que notre ami Yves va contribuer à ton topic.
Yves Benisty
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Re: une PEP chez les BPCO?

Message : # 77611Message non lu Yves Benisty »

Mister Hyde a écrit :Je te dis ça sans fioriture:[...]
Je pense que notre ami Yves va contribuer à ton topic.
Euh, je passais par là par hasard... Et sans fioritures, entre l'article cité et la réponse de Myster Hyde, il n'y a pas grand chose à ajouter. Quelques remarques au fil de l'eau...

1) Comme c'est très bien expliqué dans l'article, il y a deux formes principales de BPCO : le bronchitique et l'emphysémateux (mais certains sont très forts, ils ont un peu des deux). Donc on ne peut pas poser la question « la pep chez le bpco » sans préciser quel type de bpco.

2) Comme souvent (toujours), tout est affaire de compromis (chose due). Qui dit BPCO dit diminution du débit expiratoire dit difficulté à expirer (et quand on n'expire pas, on expire, proverbe de plongeur). Donc on peut se dire que c'est une mauvaise idée de gêner l'expiration en ajoutant une PEP.

Mais en fait, ces patients ont une PEP intrinsèque (PEPi, ou PEEPi en anglais). C'est-à-dire que comme les alvéoles ont du mal à se vider, la pression peut ne pas revenir à 0 (la pression atmosphérique) en fin d'expiration. Il semble qu'il soit bénéfique de régler une PEP sur le respirateur (donc une PEP extrinsèque) égale à la PEPi. On peut évaluer la PEPi vite fait mal fait en regardant la courbe de pression sur le respirateur : c'est la pression en fin d'expiration. Comme la mesure de la PEPi n'est pas évidente, une bonne approximation consiste à mettre une petite PEP en vérifiant que la pression de plateau n'augmente pas. Une autre technique encore plus simple consiste à mettre une PEP de 2 à 5 cmH2O.

3) C'est bien expliqué dans l'article, il y a plein de petites choses qui ont leur importance.

-L'arrêt du tabac (c'est controversé pour des durées courtes) peut aider ; deux jours, un jour, douze heures avant l'intervention, c'est toujours ça de gagné ;

-une bonne évaluation préopératoire permet de soupçonner les patients qui poseront le plus de problèmes (radio thorax, EFR, gds pour les plus graves) ;

-équilibrer au mieux la maladie, le traitement, la prévention et le traitement des surinfections ;

-kinésithérapie préopératoire, ce qui a en plus l'avantage d'anticiper sur la kinésithérapie postopératoire (au mieux dès la SSPI) ;

-la préoxygénation est importante et elle se fait souvent demi-assis ;

-il y a souvent un gros gradient entre la PteCO2 et la PaCO2, et le seul moyen de l'évaluer est de le mesurer (gds peropératoire) ;

-préférer une sonde d'intubation taille 8 à une taille 7,5 (on gagne 30 % de résistance, loi de Hagen-Poiseuille) ;

-diminuer l'espace-mort machine en supprimant le raccord annelé ; avec les respirateurs modernes qui compensent les volumes de compression-détente, le raccourcissement des tuyaux a peu d'intérêt ;

-on peut tolérer une PteCO2 élevée, c'est mieux que de détruire le parenchyme pulmonaire avec des pressions élevées ;

-un petit coup de bronchodilatateurs juste avant l'induction et juste avant l'extubation peut aider ;

-extubation précoce (donc réchauffement, bonne gestion de la curarisation et de l'analgésie), relever le thorax, voire anticiper sur une ventilation non invasive en SSPI.

Pour les paléonto-anesthésistes, quand les EFR et autre peak-flow n'étaient pas disponibles, un moyen simple d'estimer le degré de gravité de la BPCO consistait, en consultation d'anesthésie, à demander au patient de souffler sur une allumette tenue à bout de bras. Si le patient n'arrive pas à l'éteindre, c'est que son expiration est très limitée.
Kmille
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Re: une PEP chez les BPCO?

Message : # 77708Message non lu Kmille »

Super!
Merci pour vos réponses!
Nico Caron
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Re: une PEP chez les BPCO?

Message : # 77752Message non lu Nico Caron »

Juste histoire de compliquer les choses.... Quand tu as une PEP intrinsèque à 10, calculé par ton respirateur (calcul possible sur certain respi), est ce que tu dois mettre une PEP à zéro ou une PEP à 10 pour compenser?
On nous apprend en physique que les pressions ne s’additionne pas, mais en physiologie, elle peuvent.... ou pas!
Donc la solution est classique en anesthésie, on titre et on calcul la PEP intrinsèque et le volume d'air frappé avec zéro de PEP, puis 5 et enfin 10.
On peut ventiler un BPCO à zéro de PEP si sa PEP intrinsèque est à 10!
Temps inspiratoire court, FR basse et en cas de difficulté à le ventiler, il faut être permissif sur la capnie.
Même raisonnement avec un patient intubé sur une crise d'asthme aiguë grave...
Mister Hyde

Re: une PEP chez les BPCO?

Message : # 77753Message non lu Mister Hyde »

Si tu veux mon avis avant celui probablement souverain d'Yves, afficher 0/5/ou 10 quand la PEP intrinsèque (ou physiopathologique) est à 10...car celà supposerait le cas échéant que l'appareil fasse de l'aide expiratoire (donc en pression négative), ce qui reviendrait à dire qu'il existerait les mêmes risques notamment emboliques gazeux qu'avec les positions très proclives....

peut-être qu'afficher 10 t'évitera des alarmes qu'à un moment ou un autre on te demandera d'inhiber....
Yves Benisty
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Re: une PEP chez les BPCO?

Message : # 77762Message non lu Yves Benisty »

Mister Hyde a écrit :[...] celà supposerait le cas échéant que l'appareil fasse de l'aide expiratoire (donc en pression négative)
Populaire dans les années soixante, disparu depuis longtemps. Le seul respirateur à ma connaissance qui permettait cela était le SF4. Mais ça avait tendance à effondrer les alvéoles en fin d'expirattion.

Je n'ai pas d'avis souverain sur le sujet, et j'ai peu d'expérience chez l'emphysémateux. Dans mes souvenirs, chez le BPCO, on recommande d'utiliser une PEP extrinsèque (celle du respirateur) proche de la PEP intrinsèque (celle du patient). Une méthode consiste à augmenter progressivement la PEP tant que la Pmax n'augmente pas. Et de mémoire, on arrive à des niveaux de PEP de 3 à 8 cmH2O.
nfkb
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Re: une PEP chez les BPCO?

Message : # 80254Message non lu nfkb »

Bonjour,

Je trouve cette question très intéressante. Ma conclusion est simple : au bloc opératoire dans une situation de routine, la PEP n'est pas pour moi une priorité.

J'ai écrit un billet de blog sur le sujet pour les détails : http://www.nfkb0.com/2016/03/15/faut-il ... ient-bpco/

Bonne journée !
Yves Benisty
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Re: une PEP chez les BPCO?

Message : # 80257Message non lu Yves Benisty »

Bonjour,

Joli travail ! La présentation est complète et très didactique.

Juste une petite remarque : selon l'Académie française, le mot « alvéole » est masculin.
L’analogie de la cascade (waterfall model)
Je garde, ça m'a beaucoup plu ! Le coin du bistrot aussi...
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