curarisation avant ventilation

Questions techniques, théoriques, le biomédical...

Modérateur : Marc

harmendil
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curarisation avant ventilation

Message : # 84737Message non lu harmendil »

Bonjour ,

Peut être que certains d'entre vous ont été au congrès de la SFAR le we dernier , plus particulièrement aux RFE sur les curares , hypothermie ..

Concernant celle sur les curares présentée par le Pr Plaud il en est ressortit les recommandations suivantes :

R1.1 : il n'est probablement pas recommandé de tester la possibilité de ventiler au masque avant d'administrer un curare .

R1.2 : Il est probablement recommandé d'administrer un curare pour faciliter la ventilation au masque facial .

étant étudiant en 2eme année , je suis quelque peut surpris ( que faire donc si le curare est un benzylisoquinoline , que le patient est non ventilable ET non intubable ? ) , n'est ce pas rajouter du risque pour rien ? ( un petit test avant injection ne prend que quelques secondes au final .. ) .

Peut être n'ai je pas encore le recul et l'expérience nécessaire ( "il n'existe pas de patient non ventilable" j'ai pu l'entendre plusieurs fois )

Merci de vous retour d'expérience / avis :-D
pineapple
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84738Message non lu pineapple »

Non ça n'a jamais été recommandé de tester la ventilation au masque facial et les personnes qui le font encore ne le font que par habitude. La curarisation aide effectivement à la ventilation au masque.

En revanche, si le patient présente des critères de ventilation au masque difficile prévisible, on ne va pas s'amuser à injecter un curare de durée d'action longue, à mon sens...

Mais voilà, je ne suis qu'une étudiante en deuxième année aussi!
IADE2701
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84739Message non lu IADE2701 »

ayant travailler avec le Pr Plaud c'est un pro curare mais attention on es jamais a l'abri d'un patient difficilement ventillable et ça peux arriver de vider ses surrénales donc perso je pense qu'un petit test n'a jamais tué personne
manu1973
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84740Message non lu manu1973 »

Pour remettre les choses en perspectives...il ne parle pas d'injecter le pavulon en prémedication....mais de l'esmeron, avec le sugammadex disponible...
quand au patient connu difficile à intuber ((ventiler?), intubation vigile....
Yves Benisty
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84746Message non lu Yves Benisty »

Je pense que nous sommes sur ce forum un certain nombre à avoir intubé des centaines ou des milliers de patients sans curare, avec du propofol, de l’halothane, du sévoflurane, et même du thiopental. Pour une intervention courte nécessitant une intubation, mais sans indication chirurgicale du curare, on curarise et on antagonise ?
pineapple
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84749Message non lu pineapple »

Non, on peut tout à fait intuber sans curare, mais je pense qu'il parlait des interventions nécessitant un relâchement musculaire...
Quelle est votre conduite à tenir dans ces cas là? Par exemple pour une coelio, vous curarisez bien le patient avant l'intubation (quitte à le relâcher pour la chirurgie, on en profite...). Mais vous ne nous dites pas si vous attendez de vérifier que le patient soit ventilable, ou non comme le précisent les recommandations...
Yves Benisty
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84751Message non lu Yves Benisty »

Je suis très surpris par ces recommandations. Je ne vois pas où serait le problème de vérifier la possibilité de ventiler au masque entre la perte de conscience et l'injection du curare. Le curare mettant trois minutes à agir, de toutes façons on ventilera le patient au masque (+/- avec l'aide du respirateur, pour utiliser les techniques modernes).

Dernier point, il y a quelques années, à la suite d'un événement médiatisé, certains patients nous demandaient de ne pas leur injecter de curare. Eh bien sans curare, nous avons réalisé des chirurgies qui étaient habituellement réalisées avec. C'est à se demander si le curare est un élément indispensable de la chirurgie.

Je constate l'évolution des techniques d'anesthésie. Il y a indéniablement des éléments intéressants, entre autre du côté du monitorage. Et il y a une remise en cause permanente des certitudes. Le problème est de savoir ce qui a réellement un intérêt. Je vous propose un exemple simple, la ventilation protectrice. Proposer des modalités de ventilation le moins agressives possibles pour les poumons est un objectif louable. Mais... Mais pourquoi s'imposeraient-elles pour tous les patients ? Nous avons anesthésié des millions de patients. L'idée de choisir un volume courant raisonnable n'est pas nouvelle. L'idée d'utiliser une PEP, et l'idée de faire des recrutements périodiques non plus. Nous le faisions pour des patients à risque, des chirurgies à risque (chirurgie longue dans des positions difficiles pour le patient par exemple). En quoi le fait de faire de la ventilation protectrice pour des patients à poumons sains et des chirurgies courtes (ce qui représente quand même une bonne part de nos patients) aurait un intérêt ?

Allez, je vais pousser le bouchon un peu trop loin, Maurice. Je vais prendre un exemple stupide. Supposons que l'on fasse une étude sur la réalisation d'un électrocardiogramme. L'objet de l'étude serait la réalisation d'un électrocardiogramme de la meilleure qualité possible. Il serait facile de démontrer que si le patient est curarisé, l'écg est de meilleure qualité. Faut-il curariser tous les patients à qui il faut réaliser un écg ?
Afudsa
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84756Message non lu Afudsa »

Bonjour à tous,
Diplômé depuis 4 ans, j'ai vu avec intérêt l'évolution des mentalités sur ce sujet du test de ventilation au masque avant curarisation. Pendant l'école, ceux qui ne le faisaient pas étaient quasiment traités d'inconscients criminels. Il y a 3 ou 4 ans, j'ai assisté à un intéressant pour/contre à la SFAR où les avis étaient restaient tranchés et ceux qui disaient qu'on pouvait peut-être s'en passer le faisaient avec beaucoup de prudence... et aujourd'hui la reco dit que ça ne sert à rien (ou presque) :-)

Je vois 2 sujets distincts : la curarisation d'un côté, la ventilation au masque de l'autre

Vos différentes réponses à la question posée sont un peu étonnantes car ne s'appuyent jamais sur l'Evidence Based Medecine : vos expériences perso sont toutes intéressantes, mais font-elles le poids face à des reco bien argumentées ? Les topos de Benoit Plaud s'appuyent toujours sur des publications (bon, en même temps, c'est un peu son boulot...) J'en ai écouté un certain nombre et un des arguments pro curare est que cela facilite l'exposition glottique et diminue significativement l'incidence des trauma liés à l'intubation, études à l'appui. Ca vaut le coup d'y réfléchir non ?

Pour ce qui est de la ventilation au masque, j'ai aussi lu un certain nombre de papiers qui soulignent que même bien faite, elle génère des micro inhalations. Rien de bien méchant sur le coup, mais potentiellement pourvoyeuses de pneumopathies à distance... Il est absolument nécessaire de savoir ventiler au masque mais faut il le faire systématiquement ?
Est-ce utile ?
Yves Benisty
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84758Message non lu Yves Benisty »

Afudsa a écrit :Je vois 2 sujets distincts : la curarisation d'un côté, la ventilation au masque de l'autre
Le bloc n'est plus mon activité principale, mais là il faudrait me faire un peu de formation continue. En dehors des intubations en séquence rapide, on fait comment pour intuber un patient avec un curare sans le ventiler au masque ?

Quand j'étais petit, on nous parlait de la technique du “priming” ou « pré-curarisation ». Ça consistait à injecter, avant l'hypnotique, 1/10e de la dosse du curare que l'on souhaitait utiliser, attendre deux minutes, injecter l'hypnotique, puis injecter le reste de la dose du curare. Le problème, c'est que entre la dose prévisible et la dose qui fonctionne, il y a des écarts. Et que certains patients se retrouvaient curarisés conscients.
Afudsa a écrit :J'en ai écouté un certain nombre et un des arguments pro curare est que cela facilite l'exposition glottique et diminue significativement l'incidence des trauma liés à l'intubation, études à l'appui.
Oui, c'est ce que montrent les études. Maintenant, pour un patient Mallampati 1 ayant déjà été intubé et un opérateur entraîné, faut-il le curariser ?

Ce que je veux dire par là, c'est que les difficultés d'intubation seront aplanies par le curare. Donc si on fait une étude avec tous les patients, quel que soit le score de Mallampati, quelle que soit la forme du visage, barbu ou pas, gras ou pas, avec dentier ou pas, on sera toujours dans de meilleures conditions d'intubation. Mais quand tous les voyants sont au vert, est-ce que ça a un intérêt ?
Afudsa a écrit :Pour ce qui est de la ventilation au masque, j'ai aussi lu un certain nombre de papiers qui soulignent que même bien faite, elle génère des micro inhalations. Rien de bien méchant sur le coup, mais potentiellement pourvoyeuses de pneumopathies à distance...
Potentiellement. Est-ce que ça change la vie du patient de faire une micro-inhalation ? Même problème pour la ventilation protectrice avec PEP : on peut montrer que le patient pour lequel on aura suivi scrupuleusement les recommandations fait moins d'atélectasies, même s'il est à poumons sains. Mais est-ce que ça changera sa vie ?

Je vais vous prendre un autre exemple. Il y a une étude qui montre que si on met de l'O2 aux patients en allant du bloc à la SSPI, ils meurent moins et on évite les désaturations profondes (SpO2 < 90 %) à l'arrivée en SSPI. C'est certainement vrai si on considère tous les patients. Maintenant, prenez un patient sain pour qui le trajet bloc-SSPI est court, pour lequel on a eu le temps d'évaluer l'autonomie de la ventilation, et à qui on donne de l'O2 avant de partir, est-ce qu'il va mourir pendant le trajet ? Est-ce qu'il va désaturer ? Donc oui c'est vrai, on peut donner de l'O2 à tous les patients pour le trajet bloc-SSPI. On peut aussi évaluer ceux qui en ont besoin. Et ne donner de l'O2 qu'à ceux qui en ont besoin.
Afudsa
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84774Message non lu Afudsa »

Yves Benisty a écrit : Le bloc n'est plus mon activité principale, mais là il faudrait me faire un peu de formation continue. En dehors des intubations en séquence rapide, on fait comment pour intuber un patient avec un curare sans le ventiler au masque ?
C'est assez technique : on pré-oxygène, on injecte, on s'expose et on intube dans la minute ! :okjesors:
Le remi en bolus de 1 gamma/kg associé à l'atracurium à doses usuelles et au propofol donne des résultats très intéressants. Le TOF à l'adducteur du pouce est encore à 4, certes, mais peu importe puisqu'il a déjà ouvert les cordes. Pas de "priming" dans tout ça. On exploite juste la pharmacocinétique.
Yves Benisty a écrit :Ce que je veux dire par là, c'est que les difficultés d'intubation seront aplanies par le curare
Nous sommes d'accord. C'est bien ce qui est intéressant dans le curare.
Yves Benisty a écrit :Donc si on fait une étude avec tous les patients, quel que soit le score de Mallampati, quelle que soit la forme du visage, barbu ou pas, gras ou pas, avec dentier ou pas, on sera toujours dans de meilleures conditions d'intubation. Mais quand tous les voyants sont au vert, est-ce que ça a un intérêt ?
??? Je ne suis absolument pas le raisonnement mais peu importe. Je ne dis pas qu'il faut curariser tout le monde (et je ne le fais pas) mais j'aime les arguments de ceux qui disent que "puisque ça aide, pourquoi s'en priver? "
Afudsa a écrit :Pour ce qui est de la ventilation au masque, j'ai aussi lu un certain nombre de papiers qui soulignent que même bien faite, elle génère des micro inhalations. Rien de bien méchant sur le coup, mais potentiellement pourvoyeuses de pneumopathies à distance...
Yves Benisty a écrit :Potentiellement. Est-ce que ça change la vie du patient de faire une micro-inhalation ?
POTENTIELLEMENT ?! Potentiellement l'hypothermie peut faire saigner, potentiellement l'hypotension peut rendre neuneu, potentiellement l'arrêt du coeur peut être mortel...
Bah oui. Mais pas pour tout le monde. Certains se sortiront très bien d'une hypothermie, d'une hypotension et même d'un arrêt cardiaque ! Mais lesquels ? Je n'en sais rien. Donc si je peux éviter de faire courir un risque supplémentaire, SANS le remplacer par un pire, j'évite. Et quel que soit le patient. Pour les micro inhalations ou les bulles dans les tubulures de perf, c'est pareil.
Mikeless
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84775Message non lu Mikeless »

Il y a eu les nouvelles reco de la sfar qui sont disponible ici : http://sfar.org/wp-content/uploads/2018 ... RARE-3.pdf
tiboy76
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84776Message non lu tiboy76 »

Sujet intéressant, avec des arguments pour/contre qui s'entendent.

En ce qui me concerne, cela fait près de 3 ans que je ne ventile plus un patient avant intubation. Je les pré-oxygène pendant 5 minutes, le temps de finir de les installer, de préparer mes antibios, etc... j'induis, je balance mon curare et dès que je vois le TOF s'infléchir je mets mon tube. Cela se passe nickel, et sans désaturation. Il m'est même arrivé de mettre 2-3 minutes à intuber avec un GLIDE devant une difficulté et je ne descends pas en dessous de 90% de saturation dans ces cas-là.
D'ailleurs, comme le dit Yves on peut se demander si la curarisation est vraiment tout le temps nécessaire... quand on utilise du Rémi et du Propofol qui agissent très rapidement et combinés à du Tracrium qui curarise vraiment au bout de 3-4 minutes, je trouve qu'il y a une incohérence... mise en évidence par le fait de placer le tube avec un TOF à 4 (donc patient non curarisé).
Yves Benisty
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84780Message non lu Yves Benisty »

Bonjour,

Je viens de lire les RFE. Eh bien je ne suis pas persuadé, et je pense surtout qu'il faut bien lire entre les lignes pour comprendre ce que ça apporte.
Question 1. En l’absence de critère de ventilation au masque difficile doit-on vérifier la
possibilité de ventiler au masque facial avant l’administration d’un curare ?

R1.1 – Il n’est probablement pas recommandé de tester la possibilité de ventiler au masque avant d’administrer un curare. (Grade 2-) Accord FORT.
Recommandation de grade 2-, donc d'après la méthodologie, « Faible : Il faut probablement faire ou ne pas faire (GRADE 2+ ou 2-) ».

En pratique, je vois plusieurs façons de faire, d'après ce que je lis des débats.

1. Induction et intubation en séquence rapide.

Après injection d'un hypnotique d'action rapide et d'un curare d'action rapide, on intube sans ventiler au masque.

Utilisation de la succinylcholine, pas cher, plus allergisant, non réversible, mais de courte durée d'action. Si la préoxynénation est de bonne qualité, même si on n'arrive ni à intuber ni à ventiler au masque, le patient aura repris une ventilation spontanée avant de mourir.

Utilisation du rocuronium, plus cher, surtout qu'il faut disposer de sugamadex (très cher). Moins allergisant. Pas d'augmentation de la kaliémie.

2. Injecter l'hypnotique, le morphinique et le curare dans la foulée sans attendre l'effet de l'hypnotique et sans tester la possibilité de ventiler au masque.

Ensuite, soit on attend que le curare ait fait effet, et dans ce cas, il faudra ventiler au masque. On gagne au mieux trente secondes.

Soit on intube sans attendre que le curare ait fait effet, en comptant si j'ai bien compris sur l'effet de l'hypnotique, du morphinique, et le début de l'effet du curare (et on sait que les cordes vocales ne seront pas paralysées).

Au total, le bénéfice du curare pour l'intubation est faible. Et on prend les risques liés à l'injection d'un médicament supplémentaire.

3. Intuber sans curare.

Si on lit les recommandations, ça n'est pas recommandé : R2.1 – Il est recommandé d’administrer un curare pour faciliter l’intubation de la trachée. (Grade 1+) Accord FORT.

Je suis quand même surpris, dans l'argumentaire, par « Sans curare, [...] 24,6 % ont des mauvaises conditions d’intubation. »

Je n'ai pas lu l'étude à laquelle cette phrase fait référence, mais j'aimerais savoir ce que sont « des mauvaises conditions d'intubation ». Et je pose la question à ceux qui ont déjà intubé sans curare, est-ce que sans curare un patient sur quatre a des mauvaises conditions d'intubation ?
tiboy76
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84781Message non lu tiboy76 »

Yves Benisty a écrit : Soit on intube sans attendre que le curare ait fait effet, en comptant si j'ai bien compris sur l'effet de l'hypnotique, du morphinique, et le début de l'effet du curare (et on sait que les cordes vocales ne seront pas paralysées).

Au total, le bénéfice du curare pour l'intubation est faible. Et on prend les risques liés à l'injection d'un médicament supplémentaire.

3. Intuber sans curare.

Si on lit les recommandations, ça n'est pas recommandé : R2.1 – Il est recommandé d’administrer un curare pour faciliter l’intubation de la trachée. (Grade 1+) Accord FORT.

Je suis quand même surpris, dans l'argumentaire, par « Sans curare, [...] 24,6 % ont des mauvaises conditions d’intubation. »

Je n'ai pas lu l'étude à laquelle cette phrase fait référence, mais j'aimerais savoir ce que sont « des mauvaises conditions d'intubation ». Et je pose la question à ceux qui ont déjà intubé sans curare, est-ce que sans curare un patient sur quatre a des mauvaises conditions d'intubation ?
En fait, je curarise si j'ai un bénéfice après, pour la chirurgie. On n'est, je pense, pas tout à fait dans les cas d'intubation sans curare puisque j'attends un début de fléchissement du NMT (avec l'Atracurium, cela prend une quarantaine de secondes), du genre baisse de 10-15% du T4 sur T1. Si le patient est correctement analgésié et sédaté, le risque de se retrouver avec une glotte fermée est minime (ça a dû m'arriver 1 ou 2 fois en 3 ans).

Franchement, je ne me suis jamais retrouvé en mauvaise condition d'intubation parce que je n'attendais pas les 3-4 minutes "réglementaires" de la curarisation. Les difficultés rencontrées étaient liées à l'intubation elle-même, pas à la curarisation.
Il serait intéressant de voir comment sont endormis les 25% de patients présentant des mauvaises conditions d'intubation... sans vouloir faire une bataille de "celui qui pisse le plus loin", je me suis souvent retrouvé à donner un coup de main à des MAR qui n'arrivaient pas à intuber un patient de 100 kg avec 10 µg de Sufenta, 200 mg de Propofol et 30 mg d'Atracurium et qui voulaient leur fourrer un tube en moins de 10 secondes....
Afudsa
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84784Message non lu Afudsa »

Tiboy76, je constate que nous avons des pratiques très proches en termes de type de séquence d'induction et de non-ventilation. La principale différence est que je n'utilise pas le curamètre comme indicateur, je me contente d'injecter autre chose (genre antibio) doucement pour me laisser une petite minute après l'injection de l'atracurium. Et j'observe exactement les mêmes effets de mon côté : glotte ouverte dans quasiment tous les cas.
La pré-O2 doit être très rigoureuse et je n'hésite pas à mettre les patients demi-assis sur le brancard avant même de rentrer en salle pour favoriser la ventilation. Du coup, on a vraiment du temps devant soit, y compris en cas d'intubation difficile avec recours facile au videolaryngoscope comme tu le soulignes.
Je ne ventile au masque qu'en 2ème intention si une désaturation s'amorce et que je sais que je ne pourrai intuber rapidement. Et dans ce cas, sur circuit machine avec canule de Guedel et pressions réduites.
J'induis sans curare sur des gestes courts (endo, dents) ou si c'est susceptible de gêner le chirurgien (recours à la neurostim). Dans ce cas, j'ai tendance à faire une locale de glotte à la xylo.
Yves Benisty
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84785Message non lu Yves Benisty »

Afudsa a écrit :Et j'observe exactement les mêmes effets de mon côté : glotte ouverte dans quasiment tous les cas.
Avec un hypnotique et un morphinique à la bonne dose, la glotte est ouverte. C'est ça que je ne comprends pas, on injecte un curare parce que c'est recommandé, mais on n'attend pas qu'il ait fait totalement effet. Dans ce cas, je préfère intuber sans curare et injecter le curare après, pour la chirurgie.
Afudsa a écrit :La pré-O2 doit être très rigoureuse
S'il y a un élément des recommandations avec lequel il ne faut pas transiger, c'est à mon avis celui-ci. Pouvoir disposer de plusieurs minutes avant la désaturation est un élément de sécurité indéniable.
Afudsa a écrit :J'induis sans curare sur des gestes courts (endo, dents) ou si c'est susceptible de gêner le chirurgien (recours à la neurostim). Dans ce cas, j'ai tendance à faire une locale de glotte à la xylo.
Je suis très dubitatif sur la locale de glotte. Pour obtenir une anesthésie avec la lidocaïne, il faut cinq minutes. Par contre, l'effet se prolonge. Pour un geste court, il est probable que le reste d'anesthésie locale de glotte persiste après la chirurgie, et dans ce cas, quid de la sécurité des voies aériennes ?
coyottefou
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84786Message non lu coyottefou »

moins on utilise de substance chimique et mieux ce sera.

Curare + IOT sans attente du délai d'action = Inutile, aucun argument recevable.

Curare + IOT avec attente du délai d'action = ça se discute en fonction du terrain et des pathologies du patient.

PRE OXYGENATION = SECURITE = INDISPENSABLE.
BoingBoing
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84788Message non lu BoingBoing »

Yves Benisty a écrit : Je suis quand même surpris, dans l'argumentaire, par « Sans curare, [...] 24,6 % ont des mauvaises conditions d’intubation. »

Je n'ai pas lu l'étude à laquelle cette phrase fait référence, mais j'aimerais savoir ce que sont « des mauvaises conditions d'intubation ».
Pour précision, l'évaluation des conditions d'intubation se base sur une conférence de consensus à Copenhague (1996) qui voulait établir des critères à évaluer lors d'une étude, notamment portant sur les agents myorelaxants.
Le papier cite les critères qualitatifs suivants à noter :
- facilité à la réalisation de la laryngoscopie
- position et mouvement des cordes vocales
- réactivité des voies aériennes supérieures
- mouvement des membres à la laryngoscopie
L'idée derrière ce listing était d'avoir un ensemble de critères qui seraient mentionnés dans toutes les études portant sur ce sujet afin de faciliter les comparaisons entre différents résultats.
polx
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84798Message non lu polx »

Bonjour,

Je suis du même avis que @tiboy76, la façon dont à été endormi le patient est un critère souvent oublié dans le débat curare/pas curare/ventil/pas ventil.

- Les curares améliorent les conditions de ventilation et d'intubation c'est indéniable.
- Tout comme une bonne induction hypno/morph (dose, délai d'action respecté, et vitesse d'injection respectée) permet elle aussi de bonnes conditions d'IOT (induction PROPO/REMI mise de côté... Pour moi c'est un autre débat qui mérite discussion).
- Ventilation ou non ? Oui et non. Si risque ++ connu de ventil/IOT difficile pourquoi s'en priver ? Patient à risque de Mendelson ? La balance bénéfice/risque doit primer.

=> Au total, on en revient à ce que nous fait comprendre Yves : la systématisation des choses est une aberration en soi.
polx
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Re: curarisation avant ventilation

Message : # 84799Message non lu polx »

Afudsa a écrit : Le remi en bolus de 1 gamma/kg associé à l'atracurium à doses usuelles et au propofol donne des résultats très intéressants. Le TOF à l'adducteur du pouce est encore à 4, certes, mais peu importe puisqu'il a déjà ouvert les cordes. Pas de "priming" dans tout ça. On exploite juste la pharmacocinétique.
Excusez moi mais je ne vois pas l’intérêt de faire cette stratégie d'induction ? Peut-être ai-je loupé quelque chose.
Votre induction se voudrait sans curare ? Du coup pourquoi le TRAC ? Et encore moins avec un 4/4 à l'adducteur du pouce... Autant ne pas respecter la pharmacocinétique voir le faire au chrono ou encore à la "clinique" (sauf si non ventilation...).
Et si oui pourquoi 1µg/kg seulement de REMI sachant que pour une induction sans curare PROPO/REMI se serait plus entre 2.5 et 3 µg/kg de REMI ?

Merci de m'éclairer !

Cordialement.
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