On sait, notamment, que la mortalité (directe ou après complication) liée à l’anesthésie est majorée lorsque l’acte n’est pas pratiqué ou dirigé par un médecin anesthésiste (sur 217 440 anesthésies dans 245 hôpitaux, l’excès de mortalité était de 2,5 décès supplémentaires pour 1 000 patients et de 6,9 décès après complications pour 1 000 patients) [Silber JH et al. Anesthesiology 2000 ; 93 : 152-63].
Que dire de plus que la conclusion déjà apportée par le SNIA : «L’étude n’a rien à voir avec la qualité des soins fournis par les infirmiers anesthésistes.»
L’ANESTHÉSIE : UN ACTE MÉDICAL QUI DOIT ÊTRE RÉALISÉ PAR UN MAR. [...] Elle a été confirmée par la Société française d’anesthésie-réanimation (SFAR), puis par le conseil de l’ordre en 2002.
Je cite à nouveau Pierre Lemaire, auteur d'un mémoire de droit médical (
http://www.infirmiers.com/pdf/memoire-droit-medical.pdf) qui me semble tout à fait opportun et pertinent actuellement :
«N’ignorons pas que l’élaboration de l’article 10 du décret 2002-194 du 11 février 2002, a été réalisé par un collège de personnalités regroupant, la direction générale de la santé, le syndicat professionnel des IADE (SNIA), la société savante d’anesthésie (SFAR), la commission d’entente des enseignants et les organisations syndicales de la fonction publique hospitalière. A l’issue ce texte a été arbitré par les cabinets ministériels de mesdames AUBRY et GILLOT, avant d’être approuvé par l’ensemble du groupe de travail en février 2000.
Une semaine après la publication au Journal Officiel du décret 2002-194 du 11 février 2002, la discussion concernant le rôle et les compétences des Infirmiers anesthésiste était relancé par la SFAR.
Elle remet en cause, dans son communiqué du 28 février 2003, la validité des recommandations pour l’exercice de la profession d’infirmier anesthésiste éditées par le SNIA en mai 2002.
Alors pourquoi la société savante d’anesthésie remet-elle en cause ce texte qu’elle a en partie rédigé ? »
Peut être pour des raisons politiquement correctes, P. Lemaire ne donne aucune véritable réponse à cette question mais on peut envisager :
- le corporatisme, hégémonisme du corps médical ?
- l'argent, la possibilité de facturer bcp plus cher des actes exclusivement médicaux ?
- .... ?
Tordons le cou à un terme inadéquat : la « délégation ». En termes juridiques, la délégation n’est possible qu’entre personnes de même niveau de compétence : le médecin ou chirurgien qui, en cours d’une longue intervention, délègue à un collègue médecin ou chirurgien la continuité du soin avant d’aller prendre du repos ; l’infirmière de réanimation qui passe les consignes à sa collègue infirmière avant de quitter son service, ses huit heures accomplies, etc.
Détruisons aussi le mythe de la « couverture ». Un médecin qui déclarerait couvrir les actes effectués en son absence par une infirmière ne la dédouanerait en aucune manière de sa responsabilité et devrait, de son côté, assumer entièrement la sienne : médecin comme IADE se retrouveraient sans coup férir devant les tribunaux en cas d’accident fautif ou simplement d’erreur.
Encore une fois, P. Lemaire :
«Il n’existe pas là, de délégation d’acte médical vers un infirmier anesthésiste, mais une demande médicale d’application d’un protocole, amenant l’IADE à réaliser un geste technique. L’IADE est conscient, comme nous l’avons déjà vu, que l’anesthésie est un acte médical placé sous l’entière responsabilité du médecin anesthésiste-réanimateur. Il sait également qu’il ne peut agir que sur prescription médicale d’un médecin anesthésiste-réanimateur.»
S’agit-il de revenir en arrière et d’appliquer progressivement à notre pays les mesures prises dans les pays en voie de développement, obligés, devant l’absence de médecins spécialistes, de former rapidement des infirmiers à l’anesthésie ? […] par l’un ou l’autre des acteurs dont les cursus, et donc les compétences fondamentales, sont différents ?
Nos compétences ne sont peut être pas aussi "fondamentales", mais nous sont enseignées pendant deux ans par des MAR essentiellement. C'est bien pourquoi nous souhaitons préserver la qualité des études d'IADE et nous opposons à la création d'un simple DU d'anesthésie !!!
Et comme le disait Intubator79, n'est-ce pas bien souvent les IADE qui forment les internes en anesthésie ....