L'autorisation d'opérer un majeur sous tutelle

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totoro444
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L'autorisation d'opérer un majeur sous tutelle

Message : # 21980Message non lu totoro444 »

L'autorisation du tuteur ou du juge des tutelles est-elle nécessaire pour opérer un majeur protégé ? La question se pose de plus en plus en pratique devant l’explosion du nombre de tutelles. Or, non seulement les textes actuellement en vigueur conservent une certaine ambiguïté, mais le régime applicable va être prochainement modifié.

Sommaire
Les règles actuellement en vigueur
Le régime applicable à compter du 1er septembre 2009


Les règles actuellement en vigueur
Le système repose actuellement sur une interprétation de plusieurs textes. En application de l’article 501 du Code civil, le juge des tutelles peut ainsi énumérer dans son jugement certains actes que la personne en tutelle aura la capacité de faire elle-même, soit seule, soit avec l'assistance du tuteur. Les pouvoirs que conservent le majeur protégé par une tutelle et ceux dévolus à son tuteur varient donc d’une tutelle à l’autre. C’est la raison pour laquelle certains considèrent parfois que le médecin doit avant tout traitement, obtenir une copie du jugement de tutelle afin de connaître précisément les prérogatives du tuteur en la matière.

Pourtant, la réglementation du Code de la santé publique sur cette question ne fait pas de distinction suivant les fonctions dévolues au tuteur par le juge, et n’impose donc pas une telle vérification. Dans ces conditions, s’agissant du domaine des soins, le même régime d’autorisation serait applicable quelle que soit l’étendue de la tutelle mise en place. Ainsi, l’article L.1111-4 précise que « (…) Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s'il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. Dans le cas où le refus d'un traitement par la personne titulaire de l'autorité parentale ou par le tuteur risque d'entraîner des conséquences graves pour la santé du mineur ou du majeur sous tutelle, le médecin délivre les soins indispensables (…)».

Lorsqu’un patient est placé sous tutelle, le premier réflexe du praticien doit être de recueillir l’accord du majeur si celui-ci est en mesure de faire un choix et de l’exprimer. Mais on déduit généralement de ce texte que l’accord du tuteur est également nécessaire pour procéder au traitement. En effet, si le législateur a pris le soin d’envisager l’hypothèse où le tuteur refuse le soin et de prévoir les conditions dans lesquelles le médecin peut alors passer outre ce refus, c’est a priori qu’il a souhaité que le professionnel recueille également le consentement du tuteur.

L’accord du majeur (s’il en est capable) doit donc être recherché, tandis que l’accord du tuteur doit être obligatoirement obtenu, sauf si son refus risque d’avoir des conséquences graves pour la santé de l’intéressé.

La question s’est également posée de savoir si l’accord du juge des tutelles était au surplus nécessaire. L’article L.1111-4 précité n’impose pas une telle condition. Néanmoins, il est vrai que la charte de la personne hospitalisée (annexée à la circulaire n°DHOS/E1/DSG/SD1B/SD1C/SD4A/2006/90 du 9 Mars 2006 relative aux droits des patients hospitalisés) précise que « Lorsque la personne hospitalisée est (…) majeure sous tutelle, dès lors qu’elle est en mesure d’exprimer sa volonté, son consentement doit être recherché, même s’il revient (…) au tuteur de consentir à tout traitement. Toutefois, lorsque la santé ou l’intégrité corporelle d’une personne (…) majeure sous tutelle risque d’être gravement compromise par le refus du représentant légal ou par l’impossibilité de recueillir le consentement de celui-ci, le médecin délivre les soins qui s’imposent (…). S’agissant d’un majeur sous tutelle, il appartient au tuteur de solliciter une autorisation du juge des tutelles, dans le cas où il est appelé à prendre une décision concernant la santé de la personne protégée, en l’absence d’avis exprimé par celle-ci ou contre son avis dès lors que la décision présente un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité corporelle de la personne protégée ».

Si la 1ère partie de ce texte ne fait que reprendre les principes de l’article L.1111-4, la 2nde partie prévoit quant à elle d’avoir recours au juge des tutelles sous deux conditions :

- le majeur protégé refuse le traitement ou n’est pas apte à exprimer sa volonté,

- et il existe un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité corporelle, ce que le médecin devra personnellement apprécier.

Ce texte, annexé à une circulaire, n’a cependant qu’une portée toute relative. Il convient en outre de conserver à l’esprit que les règles actuelles vont être prochainement remises en cause.



Le régime applicable à compter du 1er septembre 2009
En effet, la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs a récemment modifié le régime applicable. Ce texte entrera en vigueur à compter du 1er septembre 2009.
Il faudra ainsi à l’avenir composer avec le nouvel article 459 du code civil, suivant lequel « La personne chargée de la protection du majeur peut prendre à l'égard de celui-ci les mesures de protection strictement nécessaires pour mettre fin au danger que, du fait de son comportement, l'intéressé ferait courir à lui-même. Elle en informe sans délai le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué. Toutefois, sauf urgence, la personne chargée de la protection du majeur ne peut, sans l'autorisation du juge ou du conseil de famille s'il a été constitué, prendre une décision ayant pour effet de porter gravement atteinte à l'intégrité corporelle de la personne protégée ou à l'intimité de sa vie privée ».

A compter de cette date, l’accord du juge des tutelles (ou du conseil de famille s’il existe) devra être systématiquement obtenu dès lors que l’acte envisagé est de nature à porter gravement atteinte à l’intégrité corporelle de l’intéressé. Il appartiendra à nouveau au médecin d’apprécier ce caractère de gravité en son âme et conscience.

Il existera alors une contradiction entre l’article l.1111-4 du code de la santé publique qui ne prévoit pas d’avoir recours au juge dans une telle situation, et le nouvel article 459 du Code civil qui exigera au contraire son accord. Deux interprétations seront alors possibles :

- soit on considère que l’article L.1111-4 du code de la santé publique constitue un texte spécial applicable en matière de soins, qui l’emporte sur le nouveau principe général issu du code civil,

- soit on combine ces deux textes, et on ajoute à l’accord du patient et de son tuteur celui du juge, sauf cas d’urgence.

A ce stade il est difficile de savoir dans quel sens seront interprétés les textes. La prudence consistera certainement dans de telles circonstances à solliciter l’accord du juge des tutelles afin d’éviter toute contestation ultérieure. Cette démarche auprès du juge devrait en pratique être réalisée a priori par le tuteur du patient.

Nathalie JEGU, Juriste - 31/07/2007 - Mis à jour le 27/08/2007


source : http://www.macsf.fr/vous-informer/l-aut ... telle.html
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