Conséquences statutaires de la reconnaissance au niveau Licence du Diplôme d'État infirmier : de multiples interrogations chez les syndicats
L'annonce faite par Nicolas Sarkozy, vendredi 13 mars 2009 lors de son déplacement au Centre hospitalier de Rambouillet (Yvelines), sur l'ouverture prochaine de négociations sur le reclassement en catégorie « A » de la FPH (Fonction publique hospitalière) des infirmiers hospitaliers du secteur public suscite de multiples interrogations de la part des syndicats de la FPH. A ce stade, on sait seulement avec certitude que les infirmiers qui commenceront leur formation en septembre 2009 et sortiront diplômés en 2012 seront intégrés dans le processus LMD (licence, master, doctorat) au niveau licence et que les diplômés d'avant 2012 seront également visés. Ainsi, le chef de l'État a indiqué le 13 mars à propos des infirmiers déjà en poste : « On ne veut pas de deux statuts et des gens plus ou moins bien payés selon la date d'entrée dans le métier ». Interrogée mardi 17 mars par un étudiant de l'Essec, lors d'un débat organisé en soirée par l'Institut Montaigne sur le thème de la mesure de la qualité des soins, à propos de l'éventualité d'un lien entre la dégradation de la qualité des soins et la faible reconnaissance de la profession infirmière, Roselyne Bachelot a déclaré qu'à l'occasion de la négociations sur les conséquences statutaires et financières de la reconnaissance en catégorie A du diplôme d'État d'infirmier, « le dialogue social devra être extrêmement approfondi, y compris avec l'ensemble des professions de santé ». « Nous avons devant nous quelques semaines, et pourquoi pas quelques années, de discussions sur ces sujets ».La ministre de la Santé a expliqué qu'une première phase du travail en cours depuis plus d'un an relative à la reconfiguration du diplôme infirmier avec les huit syndicats représentatifs de la FPH, les organisations syndicales infirmières et la Dhos était terminée. « Le processus va être validé dans les prochaines semaines », a-t-elle assuré indiquant que le diplôme, acquis en 38 mois actuellement, garderait son aspect professionnalisant.LA QUESTION DE LA RETRAITE À RÉSOUDREPour le reste, c'est-à-dire la négociation sur les conséquences statutaires et financières du passage des infirmiers en catégorie A, la ministre de la Santé a mis en avant la nécessité d'un dialogue social « extrêmement approfondi ». « La restructuration de la catégorie A de la FPH devra faire en sorte d'éviter qu'il y ait une tête hypertrophiée par rapport aux autres catégories », a-t-elle insisté. Elle a par ailleurs précisé que les sages-femmes, qui sont une profession médicale à compétences circonstanciées, seront, quant à elles, considérées comme relevant du niveau master (bac+ 4 et bac+5).Parmi les difficultés à résoudre lors de ces négociations, Roselyne Bachelot a notamment relevé la question de la retraite. En effet, le passage des IDE (infirmiers diplômés d'État) d'une catégorie à l'autre pourrait avoir un impact important puisque l'âge de départ à la retraite des agents de catégorie B est actuellement de 55 ans contre 65 ans pour ceux relevant de la catégorie A. La ministre a également jugé nécessaire de « poursuivre le dialogue sur les passerelles entre les niveaux » : « comment passer du niveau L [licence] au niveau M [master] et pourquoi pas D [doctorat] ».Les négociations à venir devraient donc dans un premier temps se focaliser sur la réponse à apporter à certaines questions : quel public infirmier sera concerné et à partir de quand ? Sans oublier les contraintes de financement compte-tenu des coûts directs et induits de ce passage d'une catégorie à l'autre. Le rapport Igas/Igaenr (Inspection générale des affaires sociales/inspection générale des affaires de l'Éducation nationale et de la recherche) de septembre 2008, consacré à l'évaluation de l'impact du dispositif LMD sur les formations et le statut des professions paramédicales, avait évalué le surcoût total chargé sur 5 ans à 2,28 millions d'euros pour la seule FPH dont 424 millions d'euros la première année d'application.UN RECLASSEMENT AUX CONSÉQUENCES MULTIPLESSelon Denis Basset, négociateur pour la fédération FO services publics et services de santé, les négociations pourraient durer jusqu'à la fin de l'année 2009 et, selon plusieurs sources concordantes, s'engager à partir du début du mois de juin. « L'objet de la négociation sera la reclassification dans la catégorie A avec la restructuration indiciaire que cela implique des personnels infirmiers actuellement situés en C2i (corps intermédiaire) entre la catégorie B et la A », explique à L'AEF Denis Basset. Cette opération va impliquer les infirmiers et infirmières, mais aussi 14 autres professions classées parmi les paramédicaux. « Ce reclassement va également impacter d'autres grades qui sont déjà en catégorie A depuis 2001 comme les infirmières puéricultrices, les ibode [infirmiers de blocs opératoires], les cadres de santé ou les Iade [infirmiers anesthésistes] », souligne-t-il tout en précisant qu' « on ne créera pas un seul corps de catégorie A dans lequel tous seront réunis ». L'année 2009 devrait être, comme l'avait laissé entendre Roselyne Bachelot lors d'une récente manifestation, celle des paramédicaux. Avec, dans un premier temps, la reconfiguration du diplôme et son universitarisation et une seconde étape avec la négociation de conventions entre chaque Ifsi (Institut de formation en soins infirmiers), l'université de rattachement et le conseil régional à qui la responsabilité de gestion des Ifsi a été transférée. « Dans les 18 mois qui viennent, indique Denis Basset, l'ensemble des 335 Ifsi devront avoir obtenu un agrément pour délivrer la formation en soins infirmiers telle qu'elle a été annoncée et prévue ». Les moyens budgétaires à mettre en oeuvre font déjà l'objet de discussions entre l'État et les conseils régionaux représentés par l'Association des régions de France, présidée par le socialiste Alain Rousset. Enfin, la troisième étape du chantier consiste en la reconstruction statutaire en articulation avec la modification relative à la formation initiale. PÉRIMÈTRE ET ÉTALEMENT À DÉTERMINER« Les interrogations que nous avons portent sur l'étalement de l'effet du passage en catégorie A et sur la prise d'effet pour les premiers infirmiers qui bénéficieront de ce reclassement », explique à l'AEF Thierry Amouroux, président du SNPI CFE-CGC qui rappelle que le sort des surveillants s'était réglé en trois ans et celui des instituteurs en une décennie. Selon lui, il conviendrait de commencer par les infirmiers les plus anciens étant donné qu'il faut six mois d'ancienneté dans un indice pour pouvoir en bénéficier au moment de prendre sa retraite. Et la CNRACL (caisse de retraite des agents des collectivités locales) ne devrait pas, explique-t-il, connaître de difficultés majeures pour absorber ce surcoût compte tenu de sa situation excédentaire. « La CNRACL a un rapport de 2,6 cotisants pour un retraité et ce régime particulier est largement excédentaire puisque qu'il aide le régime général à travers des compensations et surcompensations ».Outre la date d'effet et l'étalement de la mesure, Thierry Amouroux s'interroge que le montant de la revalorisation : « Passer en catégorie A, cela ne veut pas dire un gain important en euros. Les Ibode, les Iade et les infirmières puéricultrices sont déjà en catégorie A depuis 2001, leurs salaires ne sont pas pour autant mirobolants ». Une Ibode, indique-t-il, débute sa carrière à l'hôpital public à 1 558 euros nets et la termine à 2 549 euros ; une Iade (5 ans d'études) débute à 1 670 euros nets pour finir à 2 697 euros. Une IDE commence sa carrière à moins de 1 500 euros nets pour atteindre 2 300 euros. « Avec les départs à la retraite qui vont s'accélérer dans les prochaines années, on va être dans des situations de vrais manques », souligne-t-il. « On dit souvent que la durée moyenne de carrière d'une infirmière à l'hôpital est de 12 ans. Mais c'est une moyenne… On a ainsi une courbe en U avec la moitié des infirmiers qui ont travaillé 31 ans et des diplômés qui travaillent moins de 5 ans. » Pour ce syndicaliste infirmier, on assiste à un « véritable gâchis humain » avec une formation de 38 mois délivrée à des jeunes infirmiers qui abandonnent le métier bien trop rapidement. « Lorsqu'on essaye de chiffrer le coût de cette réforme [LMD], il faut prendre en compte ce que cela va permettre d'économiser si les jeunes restent plus longtemps dans la profession », souligne-t-il. Depuis 45 ans, calcule Thierry Amouroux, on a formé un million d'infirmières et 500 000 exercent réellement. « Le problème, ce n'est pas qu'on manque d'infirmières, c'est qu'on remplit depuis dans années un tonneau percé ». UN COÛT A GÉOMÉTRIE VARIABLEDe son côté, Yolande Briand, secrétaire générale de la fédération santé-sociaux de la CFDT, rappelle qu'il y a une discussion en cours sur les catégories A et B dérivée de l'accord Fonction publique de 2008 qui « doit normalement aboutir dans les semaines qui viennent ». « Or, explique-t-elle, cela peut entrer en conflit avec les discussions concernant les infirmières. Il faut absolument que l'on anticipe, ce que l'on ne fait pas », constate-t-elle. Selon elle, « l'intérêt de basculer ou non en catégorie A variera en fonction de l'ancienneté des infirmières. Les plus jeunes, moins de dix ans d'ancienneté, auront intérêt à bénéficier de la nouvelle classification. Pour les plus âgées, l'appréciation se fera au cas par cas en fonction de l'ancienneté et du temps restant à courir avant le départ en retraite ». Le basculement de la « catégorie B active », celle des infirmiers, en « catégorie A sédentaire » va modifier les conditions de départ à la retraite des infirmiers. Sur les 250 000 infirmières en activité dans les hôpitaux, combien peuvent être concernées ? Combien feront le choix du changement ? « C'est impossible à dire », explique Yolande Briand qui estime que le coût de la mesure sera différent selon les catégories d'infirmiers qui basculeront dans la catégorie A. « Avant 2012, date de sortie de la première promotion au niveau L, il va falloir faire un travail sur toutes les mesures pour gérer la situation du 'stock' d'infirmiers. Et là dessus, on n'a aucune certitude, cela va être une gestion au cas par cas ».Selon une évaluation de l'impact du dispositif LMD sur les formations et le statut des professions paramédicale, établie par un rapport conjoint Igas/Igaenr, l'impact dans la FPH et les établissements privés PSPH sur cinq ans (surcoût chargé) est estimé par la Dhos, la direction du Budget et la DGAFP à 2, 629 milliards d'euros, dont 493 millions dès la première année (septembre 2009-2010). Le surcoût moyen par an et par agent est estimé quant à lui à 1 527 euros.Si l'on ajoute les revalorisations induites dans les corps comparables de la FPE (Fonction publique d'État), le surcoût chargé atteindrait 11,7 millions d'euros par an (687 euros par agent), soit un total cumulé sur cinq ans de 58,8 millions. Pour ce qui est de la FPT (Fonction publique territoriale), le coût de la réforme complète (coûts chargés) est de 308 millions.
Enfin un peu de reconnaissance!!! a priori...
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