ancien infirmier devenu médecin : Usé par un conflit larvé avec la CPAM, puis un examen psychiatrique demandé par le conseil départemental de l'ordre des médecins.
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« Je suis arrivé un lundi matin, je chialais entre chaque patient. Je me suis dit qu'il fallait que j'arrête. » Yazid Nabti, médecin de Grande-Synthe, a fermé son cabinet. Usé par un conflit larvé avec la CPAM, puis un examen psychiatrique demandé par le conseil départemental de l'ordre des médecins. « Par respect pour mes patients, je préfère arrêter », assure le praticien quadragénaire, soutenu par ses patients via une pétition.
PAR OLIVIER TARTART
dunkerque@lavoixdunord.fr PHOTO « LA VOIX »
Usé. Laminé. Meurtri. On pourrait multiplier à l'envi les adjectifs du champ lexical de la souffrance pour caractériser aujourd'hui Yazid Nabti. À 40 ans, le médecin grand-synthois a fermé son cabinet. À la grande peine de ses patients, qui ont lancé une pétition de soutien qui a déjà recueilli une centaine de signatures. « Je ne peux plus être docteur, annonce-t-il calmement. Je ne peux plus m'adresser à l'ordre des médecins, ni à la Sécu. »Pourtant, l'installation de Yazid Nabti s'était déroulée dans un climat serein, en 2005. À Grande-Synthe, ville où l'infirmier devenu médecin avait grandi.
Là où son père, venu de Thionville, a trimé (à Usinor), au côté de sa mère (femme de ménage) pour lui offrir, ainsi qu'à sa soeur, « une bonne éducation ».
Expertise psychiatrique
Quelques mois après son installation, le jeune médecin s'est patiemment constitué une patientèle faite de gens simples et attachants, à l'image des Grand-Synthois. Mais il déchante. Les obstacles rencontrés face à la CPAM (lire encadré ci-contre) le minent. Quelques mois après le début de ces avanies administratives, la situation prend une tournure plus tragique. Yazid Nabti reçoit une jeune femme en détresse psychologique. « Je l'estime en danger et je l'adresse à un confrère psychiatre. En demandant, comme cela se fait, de me tenir au courant. Aucune réponse.
» Le médecin synthois insiste. « Il m'a dit qu'il ne trouvait pas pertinent de répondre à mes courriers. Même si c'est écrit noir sur blanc dans le Code de la santé. » La patiente se suicide quelques semaines plus tard. Ému, Yazid Nabti signale ce comportement à l'Ordre des médecins. Mal lui en a pris. « Je suis tombé sur quelqu'un de très condescendant. Qui m'a dit au bout de vingt minutes : "M. Nabti, prenez du recul, lisez Voltaire. Enfin... Si ça vous est arrivé durant votre scolarité". » Un comble quand on sait qu'une pièce de son cabinet est tapissée de livres et qu'il suit des études de philosophie à Lille-III.
Les ennuis ne font que commencer. « Quelques semaines plus tard, je reçois un courrier du conseil départemental de l'Ordre, qui demande une expertise psychiatrique à mon égard. » Le syndicaliste qu'il rencontre alors lui avoue n'avoir jamais vu cela en vingt ans. Pas plus que la responsable du conseil de l'Ordre des médecins du Pas-de-Calais qu'il contactera ensuite, quand il mènera sa propre enquête. « Car je m'y suis soumis, à cette expertise. Je ne voulais surtout pas que ça dégénère. Avec le recul, je n'aurais pas dû et porter plainte tout de suite... »
Discrimination ?
Car cette expertise n'a, selon lui, jamais été clairement motivée. En mars 2007, Yazid Nabti reçoit les conclusions : rien ne peut lui être reproché.
Goût saumâtre dans la bouche. « L'un des trois psys que j'ai vus m'a conseillé de lire un auteur avant de se reprendre : il me conseillait un auteur juif... Il n'est pas interdit de penser que mes problèmes viennent du fait que je me prénomme Yazid... » Perdant le sommeil, fragilisé, il ne baisse pas la garde. « Les expertises de médecin sont rarissimes, et n'existent que pour constater un état dangereux ou une infirmité !
» Discrimination ? Racisme ? Yazid Nabti contacte la HALDE (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité), présidée alors par Louis Schweitzer. « Pas de nouvelles pendant plus d'un an. Puis on me demande un rapport précis, que je rédige. Au moment de l'envoyer, je reçois une réponse négative sans même avoir été entendu ! J'ai le sentiment d'avoir été traité comme un chien... » Une rencontre avec la secrétaire d'État Fadela Amara ne le satisfait pas plus : « Son conseil était de continuer à faire le dos rond. Ça fait quarante ans que je le fais, ça suffit. Je préfère tout perdre aujourd'hui, mais me comporter comme un homme. » Alors, soutenu par l'affection de sa compagne et de sa petite fille, qui l'aide à « s'accrocher », Yazid Nabti poursuit son enquête.
Dernièrement, il a reçu le soutien de Noël Mamère, député Vert, édifié par cette histoire, tout comme le MRAP et SOS Racisme. En attendant de voir l'avenir en rose, le médecin n'arrête pas de noircir des pages. « Pour retranscrire ce que m'ont dit les avocats et les politiques du Dunkerquois. Personne ne m'a aidé. Pour poser cette question en plein débat sur l'identité nationale : on demande de "suivre des études et d'être respectueux pour que la citoyenneté puisse s'exprimer harmonieusement". Ça fait quarante ans que je le fais. Avec quel résultat ? » •
Nous avons contacté le conseil départemental de l'Ordre des médécins, sans obtenir de réponse.
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